Les prémices du repli stratégique à Ault

La création de la zone d’aménagement du Moulinet en retrait de la côte et le blocage de l’évolution du patrimoine bâti sur le front de mer par le Plan de Prévention des risques extrèmement contraignant imposé par l’Etat en 2015 ont été les prémices d’un repli stratégique à Ault.

Le PAPI, Programme d’Actions de Prévention des Inondations, est venu confirmer la volonté d’abandonner des ouvrage de protection à court terme ou d’assurer un « entretien minimal pour éviter la ruine, le temps d’organiser le repli. Ce PAPI fut traduit en 2016 dans une « convention cadre stratégie littorale Bresle-Somme-Authie » liant l’Etat, la Région, le Département, le Syndicat Mixte Baie de Somme – Grand Littoral Picard et les communes littorales.

Zone de repli du Moulinet

Au titre du repli stratégique, la ZAC du Moulinet fut créée en 2011 pour la construction de 190 logements en retrait de la côte . Sa constructibilité a été annulée en 2020 par la cour administrative d’appel pour faire respecter la loi Littoral. En 2017, le déboisement du parc a été réalisé illégalement selon Ault Environnement qui a déposé une plainte en cours d’instruction.

Un centre culturel communal a entre temps (2019-2020) été construit dans cette ZAC pour remplacer l’ancien casino, salle des fêtes communale vouée à la démolition selon les uns (Syndicat Mixte Baie de Somme Grand Littoral Picard) mais pas selon la municipalité.

Plan de Prévention des risques, PPR

Dans le même esprit, l’Etat a élaboré en 2013 sans véritable concertation un Plan de Prévention des Risques (note de présentation et règlement), le PPR des falaises picardes publié en 2015, de manière encore plus contraignante que le PPR de Criel-sur-mer pour un site équivalent. Il soumet les plus petits travaux d’amélioration de l’habitat à la production aux frais des propriétaires d’une étude prouvant que ces travaux ne peuvent accroître les risques d’érosion de la falaise, condition particulièrement absurde. En 2018, suite aux recours d’Ault Environnement et de la commune, le tribunal administratif annula le PPR qui interdisait presque tout sans distinction entre la zone menacée à 30 ans et la zone menacée à 100 ans. Mais en 2020 la cour administrative d’appel annula ce jugement malgré l’avis du magistrat rapporteur. Saisi par Ault Environnement et la commune, le Conseil d’Etat refusa la recevabilité de la demande de cassation.

Par manque de rigueur ou par mauvaise foi, l’Etat ne cessa d’alerter les juges sur les risques pour les vies humaines et sur l’accélération du recul de la falaise (en 10 ans, le recul prévu à 100 ans aurait déjà été atteint, ce qui est totalement faux, le recul de la falaise (note sur le recul) étant stoppé depuis 1983 le long des ouvrages de protection, limité à 30 centimètres par an en ville sur les 150 mètres non protégés et estimé à 50 cm par an en zone agricole). L’Etat insista sur le caractère inéluctable de l’érosion, rappela que la nouvelle doctrine de l’Etat ne prenait pas en compte l’existence d’ouvrages de protection et n’expliqua pas pourquoi le PPR de Criel était plus souple pour les transformations de bâtiments existants.

Cette position de l’Etat a été confortée par certains médias à la recherche de sensationnel en publiant des chiffres faux et des images sorties de leur contexte.

Stratégie Littorale Bresle-Somme-Authie, PAPI

Les pouvoirs publics ont signé en septembre 2016 une « convention cadre stratégie littorale Bresle-Somme-Authie » liant l’Etat, la Région, le Département, le Syndicat Mixte Baie de Somme – Grand Littoral Picard et les communes littorales sur la base du PAPI, Programme d’Actions de Prévention des Inondations élaboré en 2015 et labellisé le 5 novembre 2015 pour 6 ans par la Commission Mixte Inondation, instance nationale pilotée par l’Etat.

Un chapitre « éboulements de falaises » regroupe les actions prévues à Ault : prévention des inondations (eau de pluie venant du plateau), réduction de la vulnérabilité (imperméabilisation, réduction des risques de fuites aux abords de la falaise, relocalisation de réseaux d’eau et d’assainissement à l’écart de la falaise), repli stratégique, aménagement.

Il n’est pas prévu de confortement d’ouvrages de protection de la falaise tels que l’achèvement de la digue

83 ou la remise en état de la casquette et des murs de soutènement de l’ancien casino. Au contraire il est prévu pour les ouvrages existants soit la « déconstruction » (épis du Bois de Cise), soit un « entretien minimal pour éviter la ruine le temps d’organiser le repli » (Ault-centre et Onival).

Par contre sont projetés le renforcement de l’ancrage du cordon de galets du Hable d’Ault et des protections des autres stations du littoral.

Certaines actions en cours ou à l’étude à Ault vont dans le bon sens mais la lourdeur de certains investissements d’embellissement du centre-bourg compromet probablement la capacité à protéger le front de mer à court terme.

Ce qui est positif pour le littoral:

  • La réfection de l’étanchéité des réseaux d’eaux usées.
  • La reprise du réseau d’eau pluviale de la Grande Rue du centre-bourg qui débouche sur la mer.
  • L’imperméabilisation des espaces publics proches de la falaise, sans malheureusement de solution satisfaisante pour la gestion de l’eau pluviale en surface.
  • Le projet de maîtrise des eaux pluviales du plateau agricole qui pourrait se concrétiser en 2023, 20 ans après l’étude SOMEA, avec une priorité nouvelle pour l’hydraulique douce à la place des bassins de type autoroutier, sans malheureusement miser sur une désimperméabilisation des terres par de nouvelles pratiques culturales.

 

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